Celui qui un jour a été copropriétaire ou vécu en copropriété, notamment dans les grandes agglomération, sait que le respect du règlement de copropriété est un combat quotidien : un voisin bruyant, une annexion des parties communes, une modification de l’aspect extérieur de l’immeuble sans autorisation du syndicat des copropriétaires ou encore l’exercice d’une activité commerciale dans un local - qui bien que commercial - n’est pas aux normes (par exemple le cas très fréquent des extractions des airs viciés de cuisson pour les activités de restauration).
Il arrive bien souvent que la violation du règlement de copropriété ne résulte pas du copropriétaire lui-même mais de son locataire.
Dans cette hypothèse, que peut faire la copropriété pour faire cesser une violation du règlement du fait d’un locataire ?
Par définition, le contrat de bail par lequel le copropriétaire confère la jouissance de son lot, n’a d’effet qu’à l’égard des parties signataires, c’est-à-dire du copropriétaire et de son locataire. Les droits et obligations qui en découlent ne peuvent donc être invoqués que par eux seuls.
Mais, dans le même temps, le copropriétaire, tenu par les dispositions du règlement de copropriété, est débiteur envers de le syndicat des copropriétaires de toutes les obligations qui découlent du règlement de copropriété et qu’il se doit de faire respecter par son locataire, de sorte que s’il n’existe aucun rapport direct entre le locataire et le syndicat des copropriétaires, il existe un rapport indirect découlant des obligations qui s’imposent au copropriétaire et que ce dernier à l’obligation de faire respecter.
Il faut distinguer deux actions : A) l’action directe du syndicat des copropriétaires et B) l’action oblique.
A) L’action directe du syndicat des copropriétaires contre un locataire.
L’action directe est l’action exercée en son nom et pour son propre compte par le syndicat des copropriétaires contre un locataire aux fins de faire cesser un trouble caractérisé par la violation du règlement de copropriété qui lui est opposable (Civ. 3e, 14 avril 2010, n°09-13315).
Cette action, dès lors qu’une faute est démontrée - et en l’espèce la violation du règlement de copropriété - permet au syndicat des copropriétaires d’obtenir des mesures visant à la cessation des troubles constatés (astreinte, interdiction, remise en état, etc.).
On rappellera également que la jurisprudence reconnaît au syndicat des copropriétaires la possibilité d’agir directement contre le locataire (et également le copropriétaire) (Civ. 3e, 11 mai 2017, n°16-14339) sur le fondement des troubles anormaux de voisinage.
A ce propos on soulignera qu’un trouble anormal de voisinage ne résulte pas nécessairement d’une violation du règlement de copropriété ou d’un non-respect de la réglementation en vigueur. Une activité tout à fait licite et qui respecterait l’ensemble des règles qui s’imposent à elle pourrait tout à fait caractériser un trouble anormal de voisinage dès lors que l’activité générerait, en elle-même, des nuisances qui excèdent les inconvénients normaux de voisinage (CA Versailles 17 novembre 2020, n° 17/01251).
B) L’action oblique.
L’action oblique, dans cette hypothèse, est l’action exercée par le syndicat des copropriétaires aux lieux et place du copropriétaire défaillant aux fins d’obtenir l’exécution par le preneur de ses obligations et, en dans les faits, la résiliation du bail.
Quelles sont les conditions de l’action oblique ?
Le syndicat des copropriétaires doit être créancier du copropriétaire ; il l’est nécessairement en vertu des obligations auxquelles le copropriétaire est tenu du fait du règlement de copropriété. Pour se placer sur le terrain de l’action oblique, le syndicat doit donc rapporter la preuve d’une violation du règlement de copropriété (généralement nuisances sonores, olfactives, etc) (Civ. 3e, 14 novembre 1985, n°84-15577.)
Le syndicat des copropriétaires, dès lors qu’il se place dans les habits du bailleur, doit également rapporter la preuve d’une inexécution d’une ou plusieurs obligations découlant du contrat de bail. Généralement, les baux prévoient systématiquement une clause aux termes de laquelle le preneur s’engage à respecter les dispositions du règlement de copropriété dont il reconnaît avoir reçu copie. Par conséquent, l’inexécution du règlement de copropriété entraîne généralement l’inexécution d’une des obligations du bail.
Le syndicat des copropriétaires doit rapporter la preuve d’une négligence du copropriétaire, c’est-à-dire l’absence de mise en œuvre d’une action efficace pour faire cesser le trouble ; et la simple mise en demeure ne suffit pas (CA Nancy, 2e chambre civile, 9 avril 2015, n°13/03512.)
Enfin, le syndicat des copropriétaires doit rapporter la preuve d’un préjudice.
Lorsque ces conditions sont réunies, le syndicat des copropriétaires peut, sur le fondement de l’action oblique, agir en résiliation du contrat et expulsion.
Un copropriétaire peut-il agir, sur le fondement de l’action oblique, en résiliation du bail liant un autre copropriétaire à son locataire ?
La jurisprudence vient de répondre par l’affirmative (Civ. 3e, 8 avril 2021, n°20-18327) ce qui a le mérite, au moins pratique, de permettre à un copropriétaire de ne pas avoir à attendre le vote de l’assemblée générale des copropriétaires pour engager une action, ni d’être confronté à un vote négatif.
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